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Histoire

Un marquis clandestin à Wissous pendant la Révolution

Mme Liliane VIDAL, membre du Cercle Généalogique de l’Essonne, nous a fait part de la découverte par son association dans les archives du département d’un fait inconnu et romanesque qui eut Wissous comme théâtre pendant la Révolution. Nous les en remercions. A partir de cette information documentée envoyée, nous avons fait des recherches pour compléter la connaissance des personnages.

Pendant la Révolution, nombre de membres de la noblesse ont émigré pour échapper à un triste sort. Ce ne fut pas le cas de Benjamin Léonor Frotier de la Coste-Messelière, Marquis de la Coste-Messelière. Ce rejeton d’une vieille famille du Poitou dont les lettres de noblesse remontent au 14° siècle, a préféré entrer dans la clandestinité à Wissous en y épousant sous un faux nom une roturière Rose Barbe Balleti, née le 6-11-1769, fille de cultivateurs sans doute d’origine italienne, le 27 nivose An II (16 janvier 1794). Le marié se déclare être Benjamin Eléonor Louis Frotier Lacoste âgé de 33 ans, né à Paris le 10-08-1760, date de la naissance du Marquis de la Coste-Messelière. Les recherches généalogiques ont aisément dévoilé l’identité du noble fuyard, se faisant passer pour un honnête ‘laboureur’.

Celui-ci venait de divorcer de Justine Saint-George de Vérac le 15-07-1793, dont il eut un fils. Il ne devait plus être en honneur de sainteté dans sa famille du fait de ce divorce et de sa mésalliance. Cela peut être aussi une explication à son entrée en clandestinité. Pour vivre heureux vivons cachés.

Mais qui était ce mystérieux Marquis, fils du comte Louis Marie Joseph Frotier de la Coste-Messelière (1725-1778) ? Il fut capitaine de dragons au régiment de La Rochefoucauld, mestre de cavalerie, ministre plénipotentiaire du roi et fut reçu à la cour en 1780. Elu député de la noblesse aux Etats Généraux de 1789,( du 22 mars 1789 au 30 septembre 1791) il prit des positions très libérales en particulier contre les privilèges du clergé. Il présida en 1790 la commission chargée de la liquidation des biens de celui-ci et en a bien profité pour racheté ses biens dans le Poitou. Prudemment, Robespierre étant toujours là et la terreur faisant rage, il disparaît momentanément dans la clandestinité au début de 1794*.

Après la chute de Robespierre, il continue à vivre à Wissous sous son nom d’emprunt et ne quitte la commune que 6 ans après s’y être réfugié. Partisan de Bonaparte, il réapparaît alors sous sa véritable identité et est nommé sous-préfet de Moselle le 19 germinal an VIII (9 avril 1800), puis préfet de l’Allier le 21 thermidor an X (13 aout 1802). Membre de la légion d’honneur le 25 prairial an XII (14/06/1804), il meurt subitement à Moulin à son poste, le 3 juillet 1806.

Pendant leur séjour à Wissous, le couple Frotier-Lacoste donne naissance à trois enfants ( deux garçons et une fille). En 1800 et en 1804, deux autres enfants naîtront, un garçon et une fille.

Sans tomber dans le sentimentalisme, on est porté à croire que la trajectoire romanesque du Marquis semble indiquer une véritable histoire d’amour entre celui-ci et sa deuxième femme épousée très peu de temps après son divorce. Sa réapparition publique tardive en serait aussi une autre preuve.

Il semble certain que les habitants de Wissous ont protégé le couple clandestin lui permettant de couler des jours tranquilles dans la commune en attendant des jours meilleurs.

* Selon une source, le Marquis aurait été arrêté au cours de l’An IV (du 23 septembre 1795 au 21 septembre 1796) comme émigré, traduit devant le tribunal criminel et acquitté. Cela semble peu plausible, puisqu’à cette époque il se cachait sous une fausse identité à Wissous.

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